Ormuz
Ormuz
Jean ROLIN
Editions P.O.L.
Entre reportage et roman, Jean Rolin, «journaliste vagabond», a écrit une «demi-fiction», étayée et renseignée par deux voyages préliminaires dans la région du détroit d’Ormuz, qui relie le golfe Persique au golfe d’Oman. Du lieu au non-lieu, l’intrigue se désagrège dans un climat délétère et des considérations plus journalistiques que romanesques. Autant en emporte la mer, elle aura le dernier mot.
Le lieu, l’espace, les noms, les bateaux de guerre, les tactiques de guerre navale, les enjeux géopolitiques liés au gaz, au pétrole, à l’armement nucléaire… un cadre omniprésent, précis, abondamment décrit où percent à peine la figure floue du héros, son projet et ses errements restant paradoxaux et imprévisibles, et celle du narrateur, arpentant la région dans l’ombre du très mystérieux héros. Une tension plus qu’un suspens, suspendu lui-même aux tergiversations du narrateur, et contenu par la menace permanente liée au climat de guerre toujours imminente, larvée, dans une région qui concentre et commande l’ineptie et la violence de ce monde. Les paysages aussi tendent vers l’insupportable, l’accablement, où l’humain vacille sous la chaleur et s’englue dans les boulettes d’hydrocarbure.
Jeu périlleux de l’écriture qui campe à peine l’humain, entre inconsistance et mystère, qui lasse et qui ressaisit son lecteur au moment où il va s’échapper, et qui finit par le retenir dans une attente de la fin… dont je ne dirai rien. C’est comme ça, vous n'avez qu’à le lire
Françoise M