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Disons-le, il est des livres qu’il nous arrive de lire, comme par inadvertance. De ces livres qui viennent facilement combler la vacuité d’une journée maussade. Une manière de détournement du spleen, une distraction. De ces livres, disais-je, ou de ces musiques en fond sonore un rien visqueux tel un fond de sauce. Toutes autres sont les chansons de Robert Johnson sculptées par et dans la nuit, prélevées au plus profond de notre intranquillité. C’est cela qui produit cet effet si évident quand bien même le sens exact, parfois crypté, des paroles peut nous échapper. Si certaines métaphores sexuellement explicites semble guider notre écoute, il est vrai que d’autres allusions, d’autres chevauchements verbaux nous entraînent sur bien des chemins plus escarpés, plus rugueux. Les thèmes fondamentaux du blues sont bien là. L’extrême pauvreté d’une enfance confrontée au racisme des maîtres blancs, les travaux accablants, déshumanisants, la volonté de survivre, les voies ferrées de l’errance, l’alcool, l’amour, la perte de l’amour et la musique. Jouer, apprivoiser les accords, en inventer de nouveaux, inouïs. Les maîtres se nomment alors Lonnie Jordan, Son house, Ike Zinnerman…Plus tard les rencontres rassembleront tout ce que de jeunes musiciens éblouis de blues feront entendre dans le monde entier. Éric Clapton, les Stones, canned Heat et tant d’autres ont popularisé les chansons de Robert Johnson. « Terraplane blues », premier enregistrement, premiers gains décents, la vie consumée à Memphis, Chicago, Détroit. Cependant l’enfant du sud ne résistera pas longtemps à l’aimantation des origines. A Greenwood, un mari jaloux qui avait peut-être quelques raisons de l’être, mettra un point final au turbulent road-movie. Nous sommes alors en 1938.

Love in Vain ne peut se réduire à une simple biographie. Les gravures de Mezzo en noir et blanc sont d’une expressivité, d’une puissance évocatrice telle qu’il ne fait aucun doute que « le diable lui a tenu la main ». Avec les textes de JM Dupont, concis, éclairants et malicieux, c’est le lecteur qui est pris par la main, pas de guide plus avisé pour cette immersion dans le tumulte d’une vie toute entière donnée à la musique.

Christian Boisson

Love in vain

BD Mezzo et JM Dupont.

Robert Johnson 1911/1938 Glénat

Love in vain
Love in vain
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