Transport
Le roman est construit en trois mouvements. Au premier mouvement une rencontre entre un homme brun et une femme rousse a lieu dans un wagon de Drancy pour un camp de la mort. Flank décrit ce transport sans métaphore, sans poésie, au plus prés du réel, au plus prés des corps. La plume est féroce et courageuse. Et de cette plume surgit une réalité coriace autant qu’une merveilleuse lumière. Lorsqu’un corps s’affale sur le tas de cadavres agencé dans un coin du wagon, tous les efforts sont déployés pour fermer les yeux de la morte car au milieu de l’enfer de ce mouroir reste une lueur d’humanité, un besoin de ce sens que l’on donne aux choses et qui ne nous quitte jamais.
Dans un deuxième mouvement la femme rousse donne à entendre la passion amoureuse qui malgré ce wagon n’a pas cessé de chanter en elle. Le texte est un cantique d’amour et ici aussi Flank écrit au plus prés du corps pour un long poème défiant l’érotisme facile.
Mon amour, mon amour, ô mon amour, maintenant je crie en plein visage. Vas-tu pleurer, vas-tu revenir, délaisser tes ombres et me sourire, répondre à cette attente infernale, m’empêcher de sombrer de trop de solitude ?
Je voudrais lacérer ton épaule, cracher un venin verdâtre, l’anéantir de mes pensées, souffler sur ma douleur, t’aimer intensément.
Tu entends, tu entends ?
Enfin dans un troisième mouvement l’homme brun élabore sur ce qui se passe et nous ouvre comme une fenêtre sur l’amour et sa consécration de la vie.
Le roman est une oraison à la vie à déguster.