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Bien que l'actualité littéraire de ces derniers mois ait consacré de nombreux articles à cet ouvrage , un article dans notre blog me paraît inévitable tant ce livre est magistral .
Le livre a été couronné par le Prix Fémina et le Prix spécial du Jury Renaudot .

 

Philippe Lançon, journaliste à Libération et à Charlie, est une des victimes de l'attentat du 7 Janvier 2015. Hospitalisé ensuite la plus grande partie de cette année là, il livre le récit de sa reconstruction physique et psychique .
Bien que l'écrivain ne nous épargne pas - avec raison- les descriptions de l'attentat et de son parcours chirurgical de grand mutilé il ne nous met jamais en position de voyeur mal à l'aise ou obligé . Comment réussit-il ce tour de force ? Par un immense talent sûrement, parce qu'il n'est pas faussement humble, parce que dire ce qu'il vit, ce qu'il ressent est une nécessite totale . Parce que toute sa vie d'alors se panse et se pense avec le soutien de l'art, la littérature,la poésie, la philosophie, la musique .

 

Il cite Pascal au début d'un chapitre qu'il intitule « Grammaire de la chambre » : « Tout le malheur des hommes vient de ce qu'ils ne savent pas rester au repos dans une chambre » . Lui ose dire « Il me faut donc commencer par avouer que malgré les souffrances (...), j'ai éprouvé un certain bonheur à résider ici , (...) .

Pendant des mois, où il ne peut quasiment pas parler, il n'écoute ni la radio, ni la télé, par choix . Il écoute Bach . Il dialogue beaucoup ( lui en écrivant) avec sa famille, ses amis, les soignants . Il relit en boucle, Kafka, certains passages de Proust, il est proustien dans la remémoration scrupuleuse de ses émotions liées à ses lectures, aux expositions de peinture qu'il a vues, à la musique qui souligne intensément ces souvenirs. Dès qu'il peut sortir quelques heures, malgré épuisement et douleur, c'est pour aller voir l'exposition Vélasquez, et aussitôt en faire un article . L'écriture reste l'ossature intacte de sa vie .

 

Le témoignage de ce que furent ces longs mois en compagnie forcée des soignants, et des policiers de sa garde rapprochée, est empreint d'une grande tendresse, d'admiration, de respect, mais il n'est pas solennel, il garde toute sa dimension humaine, grâce à l'expression de la vérité qui fait l'essence de toutes relations humaines, confidences, humour, colère, agacement,indifférence, empathie, incompréhension parfois . Et les silences, les regards qui en disent long aussi .

Philippe Lançon a dit « On écrit avant tout pour les vivants, mais en pensant aux morts » .

Lisez ce livre magnifique .

ML

Le lambeau

Philippe Lançon

Gallimard 

 

Philippe Lançon
Philippe Lançon

Philippe Lançon

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