Il est des hommes qui se perdront toujours
On connaît Emmanuelle Bayamack- Tam pour son livre, Arcadie.
Prix du livre Inter 2019, R. Lighieri est un pseudo sous lequel elle a écrit deux autres livres qui sont des polars.
On retrouve ici, le goût de l'auteure pour les personnages peu ordinaires et les familles dysfonctionnelles, qu'elle décortique avec un stylo d'anthropologue, de sociologue, doublé de celui d'une psy empathique et dotée d'un peu d'humour noir.
« Qui a tué mon père ? », questionne Karel le narrateur dès la première ligne, avant d'ajouter « Je crois pouvoir répondre personne ». L'auteure ensuite écrira un jeu de piste façon psychanalytique, pour aider le lecteur à se questionner « qui n 'a pas tué le père ? »
Dans cette famille, voilà donc le fils aîné Karel, et sa sœur Hendricka, qui possèdent la beauté. Ce physique de rêve constituant un malheur pour leurs jeunes vies .
Voilà leur petit-frère Mohand, difforme, infirme.
Voilà le père belge Karl , alcoolique, toxicomane, minable et maltraitant
Et la mère kabyle Loubna, passive et mélancolique, pathologiquement attachée à son fils malade.
Il serait bien sûr trop simple qu'ils ne soient que ce qu'ils montrent de manière si criante.
Voilà enfin Marseille, et surtout le quartier Antonin Artaud, (au nom fictif), le passage 50, et la communauté gitane les lieux où vivent ces personnages de tragédie antique contemporaine. En bas de la colline, qui semble si lointaine, indifférente à tout, la mer scintille.
Dans un polar, et ou une tragédie, il y a de la violence, du désir et du sexe, des amours interdites, des secrets de famille et de clan : tous les ingrédients sont réunis dans ce roman !
Le récit se déroule pendant une vingtaine d'années, les enfants grandissent, prennent des chemins parfois surprenants, jusqu'au récit de la mort du père.
Mais peut-on réellement quitter son enfance quand elle elle vous a marqué si profondément ?
MLMT
IL EST DES HOMMES QUI SE PERDRONT TOUJOURS
Rebecca LIGHIERI
P.O.L