Les Sources
On ouvre le dernier « Lafon » et on constate qu’on retrouve – et on s’y attendait- le Cantal, la Santoire, les bêtes et les paysages du Massif central, la rudesse du climat et des personnages, toujours taiseux et ruminant leurs conditions de vie, âpres et orgueilleux. Heureuse d’embarquer une nouvelle fois pour un voyage toujours dense et saisissant dans ce pays austère mais tellement attachant, raison qui fait qu’on revient justement vers les textes de M-H Lafon. On y retrouve le plaisir d’une langue singulière qui réunit des expressions et des formules populaires et une expression savante, avec une écriture au rythme soutenu qui nous tient haletant, avec une alternance de phrases courtes et de phrases longues. On entre dans le roman et on se dit qu’on se retrouve dans un pays maintenant familier, pourquoi pas ?
Et puis ça part autrement que le dernier qu’on a lu, et si le décor est le même, on découvre d’autres personnages et une autre histoire. Et on est une nouvelle fois emporté. Emporté par le portrait d’un femme plus que décriée par son mari (je n’en dis pas plus pour ne pas déflorer) mais qui est en réalité un femme magnifique, qui se révèle malgré son désespoir pleine de courage et de détermination. Puis nous entendons aussi la voix du mari, quelques années plus tard. Ensuite ce sera le tour d’une de ses filles.
M-H Lafon ne dit pas tout, elle laisse sa place au·à la lecteur·trice, elle ne porte pas de jugement, pas de morale. Chacun·e prendra ce qu’il ou elle veut de cette histoire, de ces hommes et de ces femmes si proches de nous, dans une temporalité récente mais appartenant déjà à notre passé commun. Ce roman est aussi une peinture sociologique d’un monde déjà disparu – une paysannerie et un mode de vie que nous regardons avec une certaine nostalgie, des rapports homme-femme qui ont bougé – mais pas si éloigné de nous en fait, tapi dans les sous-sol de notre société.
NB
Les Sources
Marie-Hélène Lafon
Ed. Buchet Chastel