L’absence est une femme aux cheveux noirs
Emilienne Malfatto et Rafael Roa sont allés à la recherche des fantômes de la dictature argentine (1976-1983) qui a brisé, déshumanisé des hommes et des femmes dans 800 centres de torture et de mort. Environ 30000 disparus, environ 500 bébés volés pour “éradiquer le gène rouge”, voilà pour les chiffres plus ou moins officiels. Texte fragmenté, souvent poétique malgré la cruauté des faits évoqués, dans lequel alternent monologues de la narratrice, récits, témoignages, archives, rêves, photos qui entrent en résonance avec le texte, ce livre est une plongée vertigineuse dans des évènements tragiques qui ont marqué l'Argentine, même si une partie de la population voudrait les oublier.
Mais c'est sans compter sur l'acharnement des “Madres de Mayo “ et “Abuelas de Mayo”, les mères et grands-mères qui, elles, poursuivent leurs recherches sur les disparitions et les appropriations d’enfants. À ce jour, 137 “bébés volés” il y a plus de 40 ans ont retrouvé leur identité.
Des procès successifs au fil des décennies, des amnisties, des lois promulguées, annulées, puis en 2011 le Procès Plan systématique ont permis jusqu'à aujourd'hui de lever un peu le voile sur les crimes commis et de juger certains des auteurs de ces exactions.
Il reste beaucoup à faire et avec l'élection d’un nouveau président négationniste en 2023, qu’Emilienne Malfatto surnomme “l'homme-venin”, entre coupes sombres dans l'économie et suppression de ministères, il est à craindre que l’Unité officielle pour les recherches et la CONADI (Commission Nationale pour le Droit à l’Identité) ne puissent poursuivre leurs investigations.
Ce récit d'Emilienne Malfatto et les photos de Rafael Roa contribuent à encourager la poursuite du travail de mémoire que méritent les victimes de la junte.
M.P
L’absence est une femme aux cheveux noirs
Émilienne Malfatto - Rafael Roa
Éditions du Sous- Sol