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Rebecca Lighieri, alias d'Emmanuelle Bayamack-Tam, aime créer des cellules familiales surprenantes où les personnages sont au mieux hypersensibles, dérangés, inadaptés, mais souvent aussi des freaks hyper lucides .  L'autrice sous ce pseudonyme aime jouer avec  les ficelles du roman populaire, un peu racoleur, mais elle le fait avec virtuosité.
 Armand le père est le narrateur de la première partie. Il raconte sa  si belle vie de comédien connu, célèbre, marié à une très belle et aussi célèbre comédienne dont il est fou amoureux et réciproquement . Tous deux mènent la vie de  people qui se la pètent, sexe, théâtre, etc.. Tout baigne donc, et l'on s'interroge, où et quand ça va commencer à grincer ?
Armand s'inquiète à la naissance de Miranda qu'il adore au premier regard, alors qu'elle laisse   sa femme indifférente. Ça commence à gratter .
 Quand sa fille grandit diaphane et silencieuse le père se questionne, mais il fait fausse route. Birke, la mère reste hors-piste. Et malgré les soucis que Miranda leur causent, ils continuent tous deux leur course aveugle de grands narcissiques.
« Elle a toujours été très blonde . D'une blondeur presque argentée, irréelle, anachronique. D'une blondeur qui agit comme un signal d'alarme sur sur certains mâles. Je l'aime. Et c'est parce que je l'aime que sa blondeur m'inquiète. Comme m'inquiète son petit gabarit : elle fait un mètre cinquante-six et doit peser quarante kilos. J'aurais préféré que sa beauté soit du côté de la vigueur et de l'éclat. J'aurais préféré que sa sauvagerie intimide les prédateurs; qu'ils y regardent à deux fois avant de s'attaquer à elle. J'aurais préféré qu'elle tienne un peu plus de nous. Un peu plus de sa mère - sa carrure, sa foulée altière, son regard qui décourage les importuns et les renvoie à leur médiocrité. Et un peu plus de moi, parce que je suis un ogre alors que notre fille est une biche fragile, une Poucette que tout angoisse et que tout déconcerte . »

La deuxième partie, où Miranda prend la parole à la page 239, pourrait s'appeler « méfiez- vous des enfants sages ».  Miranda, unique personnage féminin de la Tempête de Shakespeare dont le prénom, n'a pas été choisi par hasard à sa naissance... distille peu à peu sa vérité, qui explosera telle une bombe, (dont je ne dirai rien) …. Sa rencontre avec Swan  son compagnon sera déterminante pour la suite de sa vie .
« Un seul regard jeté à Swan m'a suffi pour tout savoir de lui. Dès le premier soir, il m'a été complètement transparent et étrangement familier. Je l'ai laissé venir à moi, je l'ai laissé croire qu'il m'avait élue entre toutes, mais c'est moi qui avais fait mon choix. Tandis qu'il se frayait un chemin, jouant des coudes au milieu d'un amas compact de théâtreux avinés, je jubilais de le harponner à l'insu de tous, et sans que lui-même ait conscience que j'étais en train d'exercer mon pouvoir sur lui. Il s'avançait vers moi avec ce sourire qu'il croit irrésistible, brandissant une flûte à champagne dans ma direction. Le vin tanguait dans la flûte en plastique, et l'alcool était vraiment la dernière chose dont j'avais envie, mais je lui ai rendu son sourire et j'ai accepté son verre. »

Il y est question aussi de Kurt Cobain, de Fritz Zorn et de quelques autres, autant d'indices dans ce roman aux détours parfois énigmatiques.

C'est un livre sur la cruauté du bonheur, la magie, les métamorphoses, écrit par une magicienne de l'écriture, qui ne craint ni la crudité des propos ni la férocité des situations,une narration qui n'est pas  empreinte de gravité, et même qui nous  fait sourire. Ça se lit comme un thriller, un polar qu'on ne peut pas lâcher  .

MLMT

Le club des enfants perdus

Rebecca Lighieri 

POL

Le club des enfants perdus
Rebecca Lighieri

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