Trois femmes disparaissent
Ce texte au prime abord peut paraître déroutant : construit sous forme de fragments de notes telles qu’on peut les imaginer écrits dans le carnet d’enquête d’un détective. Puis, les indices se précisent, finissent par s’emboîter et livre peu à peu l’objet de l’enquête menée par Hélène Frappat, version féminine du détective Columbo. Nous suivons alors avec intérêt le destin de « trois femmes qui disparaissent », trois actrices d’une même lignée, célèbres dans l’histoire du cinéma, voire mythiques. Nous connaissons forcément Tippi Hedren, l’actrice attaquée sauvagement par les corbeaux (Les oiseaux, 1963- Hitchcock ) ; elle sort de cette scène imposée par un Hitchcock sadique, terrorisée et blessée au visage. Pour échapper aux tenailles de l’emprise qu’il exerce sur elle jusque hors des plateaux, elle choisit de fuir ; dès lors elle a scellé son avenir : elle est rayée du cinéma. Le même destin poursuit sa fille Mélanie Griffith. Lors du tournage de Roar, 1981, volontairement mise en danger, elle a failli être dévorée par un lion ; elle en aura le visage suturé. Elle aussi disparaîtra des écrans. Sa fille, Dakota Johnson, la dernière de la lignée, rendue célèbre par le film Cinquante nuances de grey, 2015, n’échappe pas aux fantasmes malsains des hommes du tournage. Hélène Frappat, romancière et critique cinématographique, a bâti cette « narration non-fiction » à partir de faits réels patiemment décortiqués, glanés dans 60 ans d’archives cinématographiques , 20 ans de travail, commencé avant Metoo, travail minutieux à la manière des enquêtes de Columbo.
Hélène Frappat a mis ainsi au grand jour « ce que nous avions sous les yeux depuis le début». Une enquête de grand intérêt. Un livre bien écrit.
J.B
TROIS FEMMES DISPARAISSENT Hélène Frappat Actes Sud